« Les erreurs dans la comptabilité de la SA Belgique sont non négligeables »
« Tout n’est pas aussi simple, dites-vous ? C’est possible, mais nous ne sommes pas aveugles. Nous voyons quelle voiture conduisent vos grands pontes et quels luxueux bureaux ils occupent. » Jan Tuerlinckx, avocat associé chez Tuerlinckx Tax Lawyers, s’adresse dans une lettre à l’État belge.
Chez monsieur le CFO de la SA Belgique, nous avons pris connaissance des conclusions de la Cour des comptes, qui a récemment publié son 176e rapport annuel. Elle y qualifie vos comptes annuels de médiocres. En conséquence, nous avons également contrôlé votre comptabilité. Le constat est hallucinant.
Vous prétendez que vous fonctionnez dans un environnement concurrentiel ? Que vous êtes en proie à la concurrence déloyale d’autres états ? Que votre entreprise fait énormément de bien pour beaucoup de gens ? Si tel est le cas, ce n’est pas une excuse pour ne pas tenir votre comptabilité de façon adéquate. Vous savez qu’elle doit être correcte. Les erreurs sont non négligeables. Vous n’inscrivez pas 6 milliards d’euros de revenus de la TVA. Vous laissez 11 milliards d’euros d’autres créances hors bilan parce qu’elles seraient irrécouvrables. Nous n’y croyons pas. Qui reçoit une facture doit la payer. C’est aussi simple que cela.
Tout n’est pas aussi simple, dites-vous ? C’est possible, mais nous ne sommes pas aveugles. Nous voyons quelle voiture conduisent vos grands pontes et quels luxueux bureaux ils occupent. Nous sommes au courant pour leurs chauffeurs privés. Qui roulent beaucoup, également très tôt et très tard, et qu’un chauffeur privé est donc une nécessité. Pas du tout pertinent ! Pensez-vous que nous ayons un chauffeur privé pour nous rendre au ministère des Finances ?
Les règles seraient trop techniques et complexes ? C’est le cas pour toute entreprise et tout citoyen, et eux sont parfaitement en ordre. De plus, chacun est censé connaître la loi. Il suffit de consulter régulièrement le site web du Moniteur Belge. On y trouve des téraoctets de législation. Peut-être pas toujours très compréhensible, mais c’est bien la loi. Sans compter que vous profitez des conseils de la Cour des comptes. Mais vous en faites fi. Ne venez donc pas dire que vous ne saviez rien. Il y a un nom pour cela : la fraude.
Nous constatons également que votre groupe détenait une filiale dans les Îles Vierges britanniques. Ce n’est pas joli. Nous vous avons laissé faire à l’époque, même si nous ne savons pas très bien pourquoi. Mais les choses ne se passeront pas comme ça cette fois-ci.
Nous rejetons par conséquent votre comptabilité car elle est non probante. Nous en profitons pour faire référence à votre entreprise voisine, la SA Pays-Bas. Elle enregistre pas moins de 10 milliards de bénéfice, tandis que vous cumulez les pertes jusqu’à plus de 100 pour cent de votre chiffre d’affaires. Nous soupçonnons lourdement que vous ayez mis les créances de la TVA dans votre propre poche, ce qui se traduit par une imposition de 103 pour cent pour commissions secrètes. Le fait de ne pas reprendre des créances dans la comptabilité est à nouveau une fraude, qui vient s’ajouter à l’histoire relative au paradis fiscal. Cela vaut une augmentation des taxes de 200 pour cent.
Et ce n’est pas fini. Comme il s’agit de fraude, nous examinons également vos comptes des sept dernières années. Sur tous les montants détournés, nous percevons encore un intérêt. En partie de 7 pour cent par an, en partie de 4 pour cent. Ce dernier est un cadeau.
Puis-je vous donner un conseil ? N’engagez pas d’avocat fiscaliste et ne le laissez surtout pas dire que nous avons commis une erreur de procédure. Cela nous mettrait en rogne, et ce n’est vraiment pas ce que vous voulez. Par ailleurs, nous ne devons pas nous en tenir à la procédure légale. Les preuves obtenues illicitement sont aussi des preuves, affirme le tribunal. Cherchez ‘doctrine Antigone’ sur Google, vous verrez...
Vous pouvez aussi avertir vos administrateurs que nous réexaminerons leur impôt des personnes physiques des sept dernières années. Finalement, ils n’ont pas mis ces ‘créances TVA non inscrites’ dans leur poche. Ce sera taxé à 50 pour cent, plus en guise de faveur seulement 100 pour cent d’amende, plus intérêts. Et ils s’en tirent bien, car si la SA Belgique fait faillite, ce sera à cause de leur fraude. Nous les tiendrons personnellement responsables des dettes fiscales de la SA en faillite.
Cordialement,
Votre fonctionnaire fiscal