Plus de double taxation à l’intérieur de l’Union européenne à partir du 1er juillet 2019
Lorsqu’une entreprise ou une personne physique a des activités à l’étranger, des accords internationaux bilatéraux précisent quel Etat est compétent pour taxer ces activités. Leur but est d’éviter la double imposition. Cette double imposition pouvait quand même exister quand les règles de ces accords étaient interprétées différemment d’un Etat à l’autre. Dès le 1er juillet 2019, une toute nouvelle procédure est ouverte aux contribuables, obligeant les Etats Membres de l’Union européenne à trouver une solution pour mettre fin à ces différends. Il s’agit d’une avancée révolutionnaire, attendue depuis longtemps par les entreprises et les praticiens.
Nous vivons dans un monde de plus en plus globalisé. Il est très fréquent qu’un employé travaille dans plusieurs pays, qu’une même entreprise soit présente dans plusieurs Etats ou qu’un entrepreneur réalise une partie de son chiffre d’affaires à l’étranger.
Tout ceci a inévitablement des conséquences sur le plan fiscal, chaque Etat ayant vocation à taxer non seulement les revenus réalisés sur son territoire mais aussi ceux que ses résidents recueillent à l’étranger. C’est ainsi que la Belgique prévoit, sous réserve d’exceptions, la taxation des revenus mondiaux de ses ressortissants.
Les procédures d’accord amiable des CPDI et leur inefficacité
Pour favoriser le commerce et les relations internationales, les Etats ont conclu des accords visant à éviter qu’une même personne ou société soit taxée sur le même revenu, non seulement dans son Etat de résidence mais également dans l’Etat tire sa source. C’est ce qu’on appelle des Conventions Préventives de Double Imposition (CPDI).
Ces accords déterminent, dans une situation internationale, lequel de l’Etat de résidence ou de l’Etat source peut imposer un revenu déterminé.
Malgré ces traités, les cas de double imposition internationale sont fréquents en raison de règles d’interprétation ou d’application différentes d’un Etat à l’autre. Ainsi, une même personne peut être considérée comme résident dans deux Etats différents. Il arrive aussi fréquemment que l’administration fiscale belge impose des revenus déjà taxés à l’étranger (en vertu des accords susmentionnés), tout simplement parce qu’elle estime que le contribuable n’apporte pas à suffisance la preuve de l’exercice de son activité à l’étranger.
Actuellement, les contribuables confrontés à ces doubles impositions peuvent introduire une demande d’accord amiable, obligeant les Etats membres concernés à “s’efforcer” d’éliminer la double imposition. Ces procédures d’accord amiable contraignent les Etats membres à s’asseoir autour de la même table pour trouver une solution au problème de double imposition.
Elles ne sont toutefois pas efficaces car aucune obligation de résultat ne repose sur les Etats qui peuvent décider de maintenir la double imposition s’ils ne parviennent à un accord, chacun ne voulant abandonner « sa part du gâteau » !
En conclusion, à l’issue de ces procédures d’accord amiable, dans leur mouture actuelle, il n’est pas rare que la double imposition subsiste, ce qui est dramatique pour les contribuables.
Une toute nouvelle procédure visant à régler les cas de double imposition à l’intérieur de l’Union européenne entre en vigueur le 1er juillet 2019
Heureusement, le 1er juillet 2019, une toute nouvelle procédure entre en vigueur. La grande nouveauté est qu’à l’issue de celle-ci, les Etats membres devront trancher le conflit et supprimer la double imposition.
Cette nouvelle procédure est issue d’une directive européenne de 2017 et sera d’application dans tous les Etats Membres de l’Union européenne.
Elle vise tout différend dans l’application des fameuses Conventions Préventives de Double Imposition. Son champ d’application est donc relativement large.
Concrètement, les contribuables belges devront introduire une réclamation auprès de l’autorité compétente belge dans un délai de trois ans, à compter de la date de la réception de la première notification concernant un ou plusieurs actes qui entraîne ou entraînera une double imposition.
Dans une première phase, comme auparavant, les deux Etats membres concernés devront essayer de trouver une solution amiable.
Mais s’ils n’y parviennent pas dans un délai de deux ans à partir de l’introduction de la demande, une « commission consultative » constituée de représentants des administrations fiscales des deux Etats et de personnalités indépendantes prendra le relais.
Cette commission devra rendre un avis sur la manière de trancher le conflit dans un délai de six mois à partir de la constitution de la commission, éventuellement prorogeable de 3 mois.
Les Etats membres auront toujours la possibilité de ne pas suivre cet avis pour autant qu’ils solutionnent autrement la double imposition. Mais s’ils ne parviennent pas à un accord, l'avis de la commission consultative deviendra alors contraignant. La décision définitive quant au litige devra être exécutée dans un délai de 12 mois.
Autrement dit, une obligation de résultat repose désormais sur les autorités fiscales des Etats dans le sens où la double imposition devra être éliminée à l’issue de cette nouvelle procédure de règlement des différends fiscaux dans l'Union européenne.
Une très bonne nouvelle pour les PME belges actives à l’étranger
C’est une très bonne nouvelle pour les transfrontaliers et les entreprises actives à l’étranger, en particulier les PME qui ne disposent pas des mêmes moyens que les multinationales, pour supprimer en amont, les risques de double imposition.
Il est par ailleurs prévu que les personnes physiques et les PME belges ne devront introduire leur réclamation qu’auprès de l’autorité compétente belge qui se chargera d’en informer ses homologues étrangers.
A noter que les Etats Membres pourront également faire appel à une commission de règlement alternatif des différends, afin de régler autrement le problème via la médiation, la conciliation, l’expertise, etc.
Cette toute nouvelle procédure s’appliquera aux réclamations introduites à partir du 1er juillet 2019, pour tout litige relatifs aux revenus ou aux capitaux perçus au cours d’une période imposable commençant le ou après le 1er janvier 2018.
Les problèmes de double imposition subsisteront dans les pays hors UE, la nouvelle procédure ne leur étant pas applicable.