Vruchtgebruik

Usufruit sur les actions: qui vote et qui reçoit les dividendes?

Baptistin Alaime
Dimitri Van Becelaere
Brieuc Erneux

Pour éviter les droits de succession, les parents donnent souvent les actions de leur entreprise à leurs enfants. Parfois, les parents choisissent de ne donner que la nue-propriété des actions tout en conservant l'usufruit. Dans ce cas, les actions sont "démembrées". Les actions peuvent également être démembrées en cas de décès. Par exemple, le conjoint survivant hérite de l'usufruit, tandis que les enfants héritent de la nue-propriété. Mais quels sont les droits et obligations liés à un tel usufruit sur les actions ? En tant qu'usufruitier, puis-je voter à l'assemblée générale ? De quels revenus puis-je bénéficier ? Qui doit s'inscrire au registre de l'UBO ? Voici quelques réflexions préliminaires.

 

Qui peut voter à l'assemblée générale ?

Le Code des sociétés et des associations stipule qu'en principe, le droit de vote doit être exercé par l'usufruitier. Cependant, il existe une exception à cette règle : si les statuts de la société prévoient une disposition différente, c'est cette disposition "statutaire" qui doit être suivie.

Par conséquent, il est conseillé à toute personne qui, en tant qu'usufruitier, souhaite continuer à exercer un contrôle sur la politique de la société, de vérifier, avant de procéder à la donation, si les statuts de la société ne contiennent pas de règles dérogatoires en matière de droit de vote. Il se peut que les statuts doivent être modifiés avant que la donation puisse être effectuée !

 

Qui a droit aux dividendes distribués ?

Le Code civil stipule qu'un usufruitier a droit aux "fruits", mais qu'est-ce que cela signifie concrètement ? Chaque distribution de dividendes doit-elle être considérée comme un fruit revenant à l'usufruitier ? La réponse est négative. Tout dépend de ce qui est distribué.

Si les bénéfices de l'exercice écoulé sont immédiatement distribués sous forme de dividendes, aucun problème ne se pose. Cette distribution de bénéfices est considérée comme un "fruit" et appartient donc à l'usufruitier.

Toutefois, d'un point de vue fiscal et commercial, il est souvent préférable de ne pas distribuer immédiatement les bénéfices aux actionnaires, mais de les "mettre en réserve" au sein de la société. De cette manière, la société conserve des ressources financières et le précompte mobilier peut être réduit pour les actionnaires. Les bénéfices mis en réserve sont ensuite distribués ultérieurement, par exemple après une certaine période d'attente fiscale (Ex. réserves de liquidation ou régime VVPR bis).

La question se pose alors de savoir si ces réserves accumulées peuvent encore être considérées comme des "fruits". En l'absence de lignes directrices claires, des discussions peuvent naître entre le nu-propriétaire et l'usufruitier. Vous trouverez ci-dessous quelques lignes directrices permettant de déterminer si les réserves reviennent à l'usufruitier ou au nu-propriétaire.

À qui reviennent les réserves accumulées ?

Les statuts peuvent prévoir à qui reviendront les réserves. Dans cette hypothèse, c'est la règle statutaire qui sera appliquée. Toute personne souhaitant donc faire un don a alors intérêt à vérifier au préalable les statuts de la société et, le cas échéant, à les modifier afin d'éviter toute discussion sur l'identité des bénéficiaires des réserves à distribuer. Cela peut également être stipulé dans l'acte de donation.

 

Si aucune disposition claire n'a été prise dans les statuts ou dans l'acte de donation (par exemple en cas de décès), les lignes directrices ci-dessous peuvent éventuellement être utilisées. Une distinction est faite entre les réserves déjà constituées avant la constitution du droit d'usufruit et les réserves constituées après la constitution de ce droit d'usufruit.

 

a) Réserves constituées avant la constitution du droit d'usufruit

Au début de l'usufruit, l'usufruitier est soumis à ce que l'on appelle une "obligation de restitution". Cela signifie qu'à la fin de l'usufruit, l'action doit être restituée dans le même état qu'au début de l'usufruit. Si les réserves déjà accumulées devaient être distribuées à l'usufruitier, cela affecterait la valeur de la part du nu-propriétaire car, dans ce cas, sa part vaudrait moins qu'au début de l'usufruit. Il peut donc être décidé que la distribution des réserves déjà constituées n'ira pas à l'usufruitier mais au nu-propriétaire.  

 

b) Réserves constituées après la constitution du droit d'usufruit

Les bénéfices mis en réserve après le début de l'usufruit appartiennent à l'usufruitier. En effet, la distribution de ces réserves n'entraînera pas une diminution de la valeur de la part du nu-propriétaire par rapport à la situation qu’il connaissait à la constitution du droit d'usufruit.

 

c) Réserves accumulées avant et après la constitution du droit d'usufruit

Une distribution provenant de réserves accumulées tant avant qu'après la constitution de l'usufruit doit être répartie proportionnellement entre le nu-propriétaire et l'usufruitier. Toutefois, l'assemblée générale peut préciser quel type de réserves est distribué (par exemple, uniquement les réserves accumulées après le début de l'usufruit). L'usufruitier pourrait influencer cette décision de l'assemblée générale s'il dispose d'une voix prépondérante.

 

Qui doit figurer dans le registre UBO ?

Lorsque la propriété d'une action est scindée en nue-propriété et en usufruit, il convient d'être vigilant quant à la législation UBO en vigueur. Le nu-propriétaire doit s'inscrire au registre UBO lorsqu'il possède plus de 25 % des actions représentant le capital. L'usufruitier sera inscrit comme UBO lorsqu'il détiendra plus de 25 % des droits de vote des actions.

Si les parents donnent toutes les actions (la moitié chacun) avec réserve d'usufruit à leurs deux enfants, toutes les parties devront s'inscrire au registre UBO. En effet, les parents détiennent chacun 50 % des droits de vote et les enfants 50 % des actions représentant le capital.

 

Mieux vaut prévenir que guérir

Le démembrement d'une part en usufruit et en nue-propriété à la suite d'un décès donne souvent lieu à des discussions. Par exemple, lorsqu'un beau-parent hérite de l'usufruit et que les enfants issus d'un précédent mariage héritent de la nue-propriété. Toutefois, de nombreuses discussions peuvent être évitées en décidant de prévoir, par avance, dans les statuts de la société, les droits de chacun. Cela sera également bénéfique à la continuité de l’entreprise.

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